Kongress von Verona

14/12 Procès-verbal

de la Conférence du 14 Décembre, relative aux Individus condamnés et bannis pour délits politiques Vérone le 14 Décembre 1822.

Monsieur le Comte de La Tour, Plénipotentiaire de Sa Majesté le Roi de Sardaigne, a présenté la Note ci-jointe pour informer Mrs. Messieurs les Plénipotentiaires des Cours alliées de l’inutilité des démarches faites jusqu’ici près de la Confédération suisse pour en obtenir l’éloignement des Individus condamnés dans les Etats de Sa Majesté Sarde par suite de la révolte de l’an dernier,2 et qui se sont réfugiés sur le territoire suisse. Cette mesure étant jugée par Sa Majesté le Roi de Sardaigne indispensablement nécessaire pour la tranquillité de Son Royaume, Sa Majesté demande à Ses augustes alliés d’adopter tous les moyens qui leur paroîtront convenables dans leur sagesse, afin de déterminer le Gouvernement fédéral de la Suisse à satisfaire aux justes vœux de Sa Majesté Sarde.

Messieurs les Plénipotentiaires ont reconnu que la proposition de Sa Majesté le Roi de Sardaigne était complètement justifiée par les circonstances alléguées dans la Note de Mr Monsieur le Comte de La Tour, et que les hautes Cours alliées doivent non seulement se prêter à fournir à Sa Majesté près de la Confédération suisse tous les bons offices qu’Elle réclame par rapport aux fugitifs piémontais, mais prendre acte de cette proposition pour établir en principe que tout Etat européen, placé dans une position analogue et jugeant sa tranquillité compromise par le séjour que des individus condamnés et bannis pour délits politiques feroient dans un pays limitrophe, serait en droit de faire la même démarche et de demander la même assistance aux Puissances alliées.

Et afin d’examiner et d’arrêter les moyens d’exécution les plus propres à remplir le but que les Cours alliées ont en vue on est convenu d’adresser aux Ministres de ces Cours accrédités près Sa Majesté le Roi de France des Instructions qui les mettront en état de se concerter avec le Ministère Français sur les moyens les plus prompts et les plus efficaces pour répondre à la demande de Sa Majesté le Roi de Sardaigne, ainsi que pour appliquer la marche que l’on adoptera pour cet effet à tout autre État européen, ayant recours à l’intervention des Puissances alliées dans un cas analogue.

Signé/

Metternich

Lebzeltern

Le Mis Marquis de Caraman

Comte de la Ferronnay

Bernstorff

Hatzfeldt

De La Tour

Nesselrode

Tatistscheff

Note de Monsieur le Comte de La Tour, Secrétaire d’Etat de S. M. Sa Majesté le Roi de Sardaigne, sur les démarches à faire auprès de la Confédération suisse, par rapport à l’éloignement des Piémontais fugitifs

Les démarches que le Roi de Sardaigne ordonna à Son Ministère des Affaires étrangères et à Sa Légation en Suisse pour que les moteurs et les complices de la révolte de l’an dernier 3 qui s’étoient réfugiés dans le territoire de la Confédération en fussent éloignés, sont d’autant plus connues de tous Ses augustes alliés que Leurs Majestés les Empereurs d’Autriche et de Russie et le Roi de Prusse les firent appuyer dans le temps par des notes présentées collectivement en leur nom.

Ni les unes, ni les autres n’ayant eu jusqu’ici le résultat qu’on devait en attendre, le Roi de Sardaigne sent trop combien la tranquillité de l’Europe est liée à celle de Son Royaume et des Etats environnant, et désire trop vivement tout ce qui peut concourir au but constant et magnanime des Monarques Ses Alliés pour ne pas saisir l’heureuse circonstance de la réunion de leurs Cabinets au Congrès de Vérone afin de solliciter toute l’énergie ainsi que tout le poids de leur coopération pour l’accomplissement d’une mesure si essentielle à la sûreté générale.

Hautement réclamée par l’intérêt des Souverains et des Peuples, elle ne l’est pas moins par un véritable sentiment d’humanité envers cette jeunesse partout si aisée à séduire que de perfides insinuations pourroient à l’avenir entraîner au crime ; elle est même salutaire aux individus contre lesquels elle est réclamée, puisqu’elle les priveroit de la funeste facilité de devenir plus coupables. En arrêtant de dangereuses communications, en réprimant l’audace des factieux, et en soutenant le courage des hommes bien intentionnés, cette mesure, si elle reçoit ensuite tout le complément dont elle est susceptible, est propre à prévenir bien des malheurs au nombre desquels on doit sans doute mettre en première ligne la triste nécessité de punir.

Des tentatives réitérées dont on a eu connoissance de la part de ces réfugiés, toutes vaines qu’elles ont été, n’en ont pas moins justifié la prévoyance du Roi et celle des Monarques qui avoient assisté au Congrès de Laibach, et on doit s’attendre à les voir sans cesse se renouveler tant que la Suisse, région centrale et attigue au Piémont, continuera d’offrir un lieu de protection, de ralliement et de correspondance à tous les fugitifs, à tous les ambitieux, à tous les mécontens qui de là peuvent en toute sécurité entretenir des rapports clandestins avec l’Italie, la France et l’Allemagne. Si le Directoire Fédéral à témoigné déférer aux justes instances de Leurs Majestés, si même les siennes auprès de Ses administrés ont été aussi vives que le Roi de Sardaigne aime à le croire, il est toutefois bien avéré qu’elles ont été éludées dans plusieurs Cantons, surtout dans ceux de Genève et de Vaud qui étoient appelés les premiers à en réaliser l’effet.

Le Roi de Sardaigne, intimement persuadé que tous Ses hauts alliés seront pénétrés de l’extrême urgence d’une intervention la plus pressante et, au besoin, la plus imposante de leur part auprès de la Confédération Suisse, afin d’en obtenir sans délai l’expulsion desdits réfugiés, est également convaincu que l’étroite harmonie et la plus parfaite unité de vues qui président aux délibérations de Leurs Majestés et qui ont déjà eu tant de succès si mémorables, triompheront aussi en cette conjoncture de tous les obstacles, de toutes les lenteurs, de toutes les oppositions.

Le Soussigné, Ministre et Premier secrétaire d’Etat pour les affaires étrangères de Sa Majesté le Roi de Sardaigne, en présentant par ordre de Son Auguste Maître cet exposé aux Cabinets réunis à Vérone, a l’honneur de Les assurer que Sa Majesté attend avec une entière confiance et recevra avec autant de reconnoissance la communication des moyens que Leurs Souverains adopteront dans leur sagesse tant pour obtenir complètement l’éloignement des Fugitifs piémontais à une grande distance de Ses Etats que pour les mettre ensuite dans l’impossibilité d’ourdir, quoique de loin, de nouvelles trâmes.